Chronique d'histoire : un lundi 31 juillet 1914
Publié le 31 juillet 2024
C’était il y a 110 ans… jour pour jour.
En ce 31 juillet 1914, sous les ordres du capitaine André POULLAN, les pompiers de Nice interviennent à 21 h00 pour un incendie chez un restaurateur au 18 rue Droite.
L’une des toutes nouvelles « pompes automobiles », arrivées au corps en 1913, fait merveille.
Source : Musée des Sapeurs-pompiers de Lyon
Quelques heures plus tard, le 2 août, la « mobilisation générale » va bouleverser la vie et l’organisation du Pays.
La France entre dans le premier conflit mondial et parmi les près de 4 millions de Français mobilisés aux Armées se trouvent bon nombre de pompiers.
Jugez plutôt :
A Nice l’effectif est diminué de moitié, il ne reste plus que 40 hommes. A Beaulieu, sur les 19 pompiers de la subdivision, 11 sont partis sous les armes. La toute jeune subdivision de Cagnes, crée en juin 1913, voit son effectif passer de 40 à 10…
A Cannes, nous voici bien loin de la compagnie représentée sur le cliché du début de siècle.
Les 4/5èmes des hommes sont rappelés sous les Drapeaux et 11 pompiers tentent d’assurer le service sous les ordres du capitaine Pierre PALAIS.
Source : Adjudant-Chef Michel Airenti
Grasse et Le Cannet sont encore plus durement touchées. Difficile pour les pompiers de la cité des parfums de manœuvrer les deux pompes à bras : Ils ne sont plus que 4. Et la subdivision de Le Cannet passe en quelques jours de 18 à 2 pompiers.
A Menton, Charles WIPF, sous-lieutenant commandant le corps depuis le 8 mars 1913 change de tenue… le pantalon en drap de laine rouge et le manteau « gris de fer bleuté » remplacent son uniforme de pompier… mobilisé, il part !
Pour mieux comprendre, je vous invite à suivre le périple de l’un d’eux. Une histoire, qu’avec l’accord de la famille de cet homme, j’évoque dans chacune de mes conférences sur nos pompiers de la Grande-Guerre.
Pierre François Jacques FORNARESIO est pompier à Nice. Né le 18 mars 1882, il est d’abord pompiers auxiliaire puis rejoint le cadre des pompiers permanents.
Mobilisé dès le 2 août, sa qualité de sapeur-pompier permet un sursis de quelques jours et c’est le 8 août 1914 qu’il rejoint le 311ème régiment d’infanterie à Antibes.
Instruction, manœuvres, et le 20 août, notre soldat embarque dans le train qui va le conduire en Meuse, au combat. Début septembre, il se bat à la ferme d’Ormont, puis marche vers Saint-Mihiel.
Il disparaît à Séraucout, petit village Meusien, le 10 septembre 1914.
Dispersé par la mitraille, dévasté par la bombe ou mangé par la terre, son corps n’est pas identifié et sa dépouille repose vraisemblablement en l’ossuaire de la Nécropole Nationale de Rembercourt-aux-Pots.
Mort pour la France, il avait 32 ans et fait partie de ces 25 à 30 000 pompiers Français qui ne revinrent pas.
Source : Contrôleur Général Hervé Berthouin
C’était il y a 110 ans… les casernes et postes d’incendie se vidaient, les anciens reprenaient du service, dans les villages, femmes et enfants apprenaient à manœuvrer la pompe… et en 1918 une loi allait permettre le recrutement de pompiers de 16 ans pour tenter de combler les vides.
C’était il y a 110 ans…
Notre corporation s’apprêtait à vivre la plus douloureuse saignée de son histoire…
Alain Bertolo
31 juillet 2024