Chronique d'histoire : 1935 – le décès du caporal Fortuné PELLEGRIN de NICE

Notre histoire nous conduit à proximité de l’usine d’incinération de la ville de Nice érigée en 1932 au quartier de l’Ariane et qui sera démantelée en 1975 pour laisser place à l’infrastructure actuelle. 

Proche de cette usine existait une entreprise qui assurait le recyclage des chiffons et papiers. 

Composée de 6 hangars alignés deux par deux sur trois rangées dans un espace relativement réduit de 50 m x 30 m, l’entreprise collectait, triait, nettoyait les tissus et récupérait les journaux en vue d’en refaire de la pâte à papier.

Source : Archives Nice-Côte d’Azur-fond du laboratoire photographique municipal -1064 W 656

Dans cette nuit du 15 au 16 août 1935, le hangar destiné an lavage des chiffons devient la proie des flammes.

L’endroit est stratégique, c’est ici que se trouvent les machines électriques, chaudières destinées au nettoyage et un réservoir de stockage de 1 000 litres d’hydrocarbures. Alertés peu après minuit, les sapeurs-pompiers s’engagent avec un « premier-secours » commandé par l’adjudant HERITIER rapidement suivi par un second départ d’une trentaine d’hommes dirigés par le sergent FORNARESIO.

Source : Archives Municipales de Nice

Après avoir évacué la famille du gardien du site, nos pompiers établissent quatre grosses lances, d’un débit unitaire de 500 litres d’eau à la minute, alimentées depuis le réservoir incendie de 100 m3 de l’usine d’incération et la réserve d’une propriété voisine. 

Plus de deux heures d’effort sont nécessaires pour éviter la propagation à l’ensemble du site et limiter le sinistre aux hangars de nettoyage, classement et emballage. Le reste du stockage est préservé.

Puis viennent les longues heures de déblai pour parfaire l’extinction et traquer tout risque de reprise. Une opération qui se poursuit jusqu’au samedi 17 août et, pour laquelle la presse de l’époque soulignera le concours précieux de l’arroseuse municipale de la ville qu’un cliché précieusement conservé à la bibliothèque municipale de Cessole vous permet de découvrir.

Source : Bibliothèque de Cessole - Musée Masséna-Nice

Le drame :

Après avoir attaqué le foyer principal, les sapeurs-pompiers tentent d’éviter l’extension du sinistre. Aussi, le sapeur-chef PELLEGRIN et le sapeur BAILLET progressent appuyés par l’action d’une nouvelle lance.

A 1 h 12, avec un fracas terrible, un mur s’effondre après la rupture d’une poutre et vient ensevelir l’un des malheureux pompiers alors que son collègue parvient à reculer. Rapidement dégagé par ses camarades, le sapeur-Chef PELLEGRIN, encore conscient et présentant de nombreuses blessures sur tout le corps, est transporté vers l’hôpital Saint-Roch de Nice.

Victime d’une fracture du crâne et de lésions à la colonne vertébrale, il décède en fin de matinée.

Sa dépouille est conduite au reposoir de l’hôpital transformé en chapelle ardente. Là, veillé par ses camarades, Fortuné PELLEGRIN reçoit l’hommage de toute une ville et des autorités.

Nommé caporal par le Maire Jean MEDECIN, ce sapeur-pompier est décoré des mains du préfet Henry MOUCHET de la médaille d’honneur pour belles actions.

Source : Journal "L' éclaireur de Nice" du 17 août 1935

Né le 24 mars 1898, Fortuné PELLEGRIN s’était volontaire engagé dans les forces françaises en 1915, au cœur du conflit, à l’âge de 16 ans et avait terminé cette première guerre mondiale comme soldat dans une toute nouvelle arme, le char d’assaut.

Il était rentré au corps de sapeurs-pompiers de Nice en 1922 rejoignant son frère ainé Marius, alors caporal.

Il laissait une veuve et un enfant de 11 ans.

Lors de ses obsèques publiques, le dimanche 18 août 1935, « notre famille » était rassemblée autour du commandant POULLAN, inspecteur départemental des services d’incendie. Les délégations de pompiers venues d’Antibes, Beaulieu, Cagnes, Cannes, Grasse, Menton, Monaco, Vence accompagnaient, avec leurs camarades niçois, cette victime du devoir vers son dernier sommeil.

Alain BERTOLO

9 septembre 2025